Arboristes Mag - Numéro 6

Christophe Drénou À L’HONNEUR Pouvez-vous nous en dire plus sur la méthode ARCHI ? C.D. : A la suite de mon travail de doctorat sur la sénescence des arbres en milieu tropical et tempéré, j’ai constaté qu’il y avait souvent confusion entre les stades de développement d’un arbre ou stades ontogéniques (étapes incontournables pour tout être vivant entre la naissance et la mort) et son état physiologique. A tous les stades de développement, un arbre peut présenter un état physiologique sain ou un état de stress qui va engendrer des réactions, comme la production de suppléants ou une descente de cime. Des situations souvent réversibles qui ne conduisent pas forcément à la mort, car les capacités de résilience d’un arbre sont importantes, à condition de lui laisser du temps. La méthode ARCHI, développée durant plusieurs années avant d'être formalisée en 2010, propose un protocole d’analyse vi- suelle des arbres en deux étapes. Il permet de distinguer la façon dont un arbre se construit (approche architecturale du dévelop- pement de l’arbre) des réactions qu’il produit en réponse à un événement extérieur (vent, casse de branche, formation d’une cavité…). Ces dernières renseignent sur son état physiologique et ses capacités de résilience. Cet outil permet de mieux appré- hender la très grande diversité des formes des arbres et d’ajuster les pronostics d’évolution de ces arbres, les éventuels risques as- sociés et les modes de gestion les plus appropriés. Quel est le domaine lié à l’arbre sur lequel nous avons le plus progressé et celui sur lequel il faudrait plus avancer ? C.D. : Les connaissances en bio-mécanique ont bien évolué. Par exemple la thigmomorphogenèse nous a permis de comprendre que l’arbre a besoin de bouger pour produire du bois. Cette nou- velle donnée remet en question certaines pratiques comme le tuteurage des jeunes arbres ou l'haubanage statique à l’aide de sangles. Alors qu’il était banni depuis de nombreuses années, l'haubanage par perçage (une tige filetée remplace la sangle) est de nouveau considéré comme une solution plus adaptée dans certaines situations. En effet, il permet de supprimer les risques d’étranglement du tronc ou des branches par les sangles, car elles ne sont pas tou- jours bien surveillées comme le préconisent les fabricants. En outre, le remplacement des haubans, lorsqu’ils sont sous ten- sion, s’avère extrêmement délicat voire impossible. Le perçage nécessite des précautions selon les types d’arbres et une désin- fection soigneuse des outils et du matériel, mais le système ne nécessite plus de suivi particulier ensuite. Le maillon faible de nos connaissances est celui du temps. Le temps de l’arbre n’est pas celui de l’homme et en particulier pas celui de l’élu. Aujourd’hui, on ne plante plus pour les générations futures comme le faisait nos grands-parents. Les arbres doivent être grands tout de suite et les forêts pousser vite, à l’image de ces micro-forêts qui sont très tendance en ce moment. Alors que c’est avec le temps qu’un arbre prend toute sa valeur - écolo- gique, paysagère, économique, sociale - et peut faire preuve de résilience après un événement traumatique. SÉLECTION D’OUVRAGES L'apprentissage de la méthode ARCHI sur le terrain passe par des exercices de schématisation des arbres. Crédit photo : Sylvain GAUDIN « Le temps de l’arbre n’est pas celui de l’homme et en particulier pas celui de l’élu. » « La taille des arbres d’ornement » 2ème édition, CNPF-IDF, septembre 2021, 320 pages « L’arbre au delà des idées reçues » Édition CNPF-IDF, avril 2016, 256 pages « Arbres, un botaniste au musée » Édition Fage EDS, octobre 2018, 176 pages « Face aux arbres. Apprendre à les observer pour les comprendre » 2ème édition, Ulmer, 2019, 184 pages 11 PR I NTEMPS 2022 6

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